Clinton Southorn, directeur de l’agronomie et de la construction chez Troon, compare les approches adoptées sur les parcours confrontés à un excès d’eau à celles mises en place sur les parcours souffrant du manque d’eau.
L’eau est à la base de toute vie sur Terre et de l’équilibre des écosystèmes. Mais cette ressource essentielle doit être gérée avec rigueur : selon les projections, le déséquilibre entre l’offre et la demande en eau à l’échelle mondiale pourrait atteindre un seuil critique dès 2030, en raison de multiples facteurs conjugués.
La gestion de l’eau est un enjeu qui nous concerne tous. Partout dans le monde, et bien au-delà de l’industrie du golf, de plus en plus d’entreprises prennent conscience du rôle essentiel que joue l’eau dans leur fonctionnement. Pour les parcours de golf, adopter une approche rigoureuse et réfléchie dans la gestion de cette ressource limitée n’est plus une option : c’est une responsabilité. Cela fait partie intégrante d’une démarche durable et équilibrée, au bénéfice à la fois de leurs installations et des communautés locales.
Alors, comment mieux gérer l’eau ?
Chez Troon, nous travaillons main dans la main avec nos clients pour identifier et évaluer l’impact de l’utilisation de l’eau sur leurs opérations, puis les conseiller sur les meilleures stratégies à adopter pour améliorer leur gestion et limiter les risques.
Tout commence par une connaissance précise de la consommation d’eau sur le parcours. Cela implique de prendre en compte plusieurs paramètres, comme le taux d’évapotranspiration, le niveau d’humidité des sols ou encore la qualité de l’eau disponible.
Un arrosage insuffisant ou excessif peut fragiliser le gazon. Il est donc essentiel de concevoir et de mettre en place un système d’irrigation capable de délivrer, de façon ciblée et efficace, la juste quantité d’eau à chaque zone du parcours.
Grâce à différents outils, comme les sondes d’humidité du sol, les intendants de parcours peuvent suivre précisément les niveaux d’humidité et ajuster les apports en eau en conséquence. Cela leur permet aussi de repérer les inefficacités du système, d’agir de manière proactive et d’optimiser la répartition de l’eau tout en préservant les ressources.
Ce que j’apprécie dans mon rôle, c’est de pouvoir collaborer avec les intendants ou les directeurs de l’agronomie pour discuter des plans d’action, s’appuyer sur les dernières recherches, puis mettre en œuvre un programme adapté. Il n’existe pas de solution unique : c’est pourquoi je vais vous présenter quelques pratiques concrètes adoptées par des parcours gérés par Troon
Trop peu d'eau
La réouverture d’un parcours de golf est loin d’être une tâche facile. Pourtant, du point de vue de la gestion de l’eau, elle peut représenter une formidable opportunité — comme ce fut le cas pour La Vie Club (anciennement Muscat Hills), où les propriétaires ont souhaité lancer une série d’initiatives pour améliorer à la fois la jouabilité, l’esthétique du parcours, et sa durabilité environnementale. Le projet a notamment consisté à réduire la surface engazonnée, surtout dans les zones hors-jeu, et à changer de type de gazon, un choix qui a permis d’améliorer le rendu visuel tout en garantissant de bonnes performances avec de l’eau usée traitée.
En peu de temps, les résultats se sont révélés concrets et significatifs : 10 000 m² de gazon ont été retirés, soit une réduction de 21 %. Parallèlement, les zones paysagées de type désertique ont été étendues de plus de 10 000 m².
2 200 plantes ornementales ont été ajoutées, et 1 100 autres sont encore à venir. En parallèle, 200 arroseurs ont été supprimés et le système d’irrigation a été entièrement repensé avec un réseau rigide. Grâce à cette réduction de surface engazonnée, la consommation d’eau d’irrigation a baissé de 20 % par rapport à l’année précédente, et cette tendance devrait se poursuivre à mesure que le projet avance.
Le choix de passer au paspalum pour les fairways, tees et roughs via un sursemis a été facilité par des expériences similaires déjà menées au Moyen-Orient. Cette conversion s’est révélée judicieuse, tant sur le plan esthétique que pour assurer une gestion durable à long terme.
Disposer d’un excédent d’eau d’irrigation ne doit jamais être une excuse pour des pratiques d’arrosage excessives. Même lorsqu’elle ne représente pas un coût direct, l’eau doit être utilisée avec discernement. Une bonne gestion de l’irrigation est essentielle non seulement pour préserver la santé du gazon, mais aussi pour générer des économies à plusieurs niveaux.
Une irrigation bien pensée permet d’améliorer durablement la performance environnementale du parcours, de réduire les coûts d’exploitation et de garantir un gazon à la fois esthétique et fonctionnel.
Trop d'eau
Prenons l’exemple du Vattanac Golf Resort à Phnom Penh, au Cambodge, où la rareté de l’eau ne constitue pas un problème pendant la majeure partie de l’année. Grâce à l’intégration de technologies avancées, l’équipe sur place peut désormais collecter chaque jour des données précieuses qui alimentent leur stratégie d’irrigation. Ce passage d’un système géré manuellement à un système centralisé automatisé, piloté par ordinateur, permet une gestion beaucoup plus précise et efficace des cycles d’arrosage.
Ce changement favorise non seulement une meilleure croissance du gazon en réduisant la consommation d’eau, mais permet également d’optimiser l’utilisation des fertilisants et des produits phytosanitaires — ce qui, au final, contribue aussi à réduire la consommation d’énergie électrique.
L’amélioration des pratiques d’irrigation a apporté de nombreux bénéfices au parcours, en soutenant à la fois la santé du gazon et les objectifs de durabilité environnementale. Parmi les avantages notables : un développement racinaire renforcé, qui améliore la résilience du gazon ; une baisse du risque de maladies grâce à une meilleure gestion de l’humidité ; et une durabilité accrue, qui prolonge la longévité des surfaces engazonnées. Une irrigation bien maîtrisée améliore aussi l’aération des sols, évite les excès d’eau nuisibles, et garantit une surface de jeu ferme et régulière, essentielle pour la qualité de l’expérience des golfeurs.
Ces initiatives illustrent concrètement comment les parcours de golf peuvent jouer un rôle actif dans la mise en place d’infrastructures hydriques plus durables et résilientes — aujourd’hui comme pour les générations futures.
